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Formation pétrolière franco-gabonaise : Une nouvelle forme de dépendance sous couvert de coopération ?

Le ministère gabonais du Pétrole signe un accord de formation avec l'IFP français, soulevant des questions sur la réelle souveraineté énergétique du pays. Cette collaboration, bien que présentée comme bénéfique, révèle la persistance des liens de dépendance technique avec l'ancienne puissance coloniale.

ParJean-Brice Mouyembe
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Formation pétrolière franco-gabonaise : Une nouvelle forme de dépendance sous couvert de coopération ?

Signature de l'accord entre le ministère gabonais du Pétrole et l'Institut français du pétrole à Libreville

Un accord de formation qui interroge notre indépendance énergétique

Dans un contexte où le Gabon cherche encore sa voie vers une véritable souveraineté nationale, le ministère du Pétrole et du Gaz vient de signer, le 24 juillet 2025, un accord de formation avec l'Institut français du pétrole (IFP). Une convention qui, sous ses apparences techniques, soulève des questions fondamentales sur notre autonomie décisionnelle dans le secteur stratégique des hydrocarbures.

Une dépendance technique qui perdure

Si le ministre Sosthène Nguema Nguema présente cet accord comme "un nouveau départ pour le secteur", force est de constater que nous perpétuons un schéma bien connu : celui d'une relation asymétrique avec notre ancienne puissance coloniale dans la gestion de nos ressources naturelles.

"Tout développement passe par la formation", affirme le ministre. Mais ne devrions-nous pas plutôt développer nos propres structures de formation pour assurer une réelle indépendance technique ?

Les ambiguïtés d'une coopération déséquilibrée

L'IFP, représenté par Loïc Du Rusquec, propose "une variété de modules, allant de l'initiation à la culture générale de l'industrie pétrolière". Une offre qui, bien que techniquement pertinente, maintient le Gabon dans une position de récipiendaire passif du savoir-faire français.

Les enjeux cachés d'une formation externalisée

À l'heure où le pays traverse une période dite de transition, dont la légitimité reste à démontrer, cette convention pose la question cruciale de notre capacité à former nous-mêmes nos cadres. Cinquante ans après l'indépendance, le recours systématique à l'expertise étrangère témoigne des échecs successifs de nos politiques de formation.

Si le renforcement des compétences est indiscutablement nécessaire, l'absence de stratégie nationale autonome de formation révèle les limites de notre souveraineté énergétique. Une situation qui n'est pas sans rappeler les années Omar Bongo, où le développement des compétences locales était déjà un défi majeur.

Pour une véritable politique nationale de formation

Il est temps que le Gabon développe sa propre expertise technique, crée ses centres d'excellence et forme ses cadres de manière autonome. La transition actuelle, plutôt que de perpétuer les schémas de dépendance, devrait œuvrer à l'émergence d'une vraie politique nationale de formation dans le secteur des hydrocarbures.

Jean-Brice Mouyembe

Journaliste gabonais indépendant, couvre les enjeux politiques, économiques et diplomatiques du Gabon avec un regard critique et engagé. Ancien correspondant pour Le Temps Afrique.